Fanjeaux / Prouille

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La fondation du monastère de Prouilhe accompagne la mission de Dominique dans le Languedoc. Prédicateur itinérant, le chanoine castillan prend à la fin de l’année 1206 la direction d’une predicatio centrée sur Prouilhe, au pied de la colline de Fanjeaux. Il se trouve là en contact quotidien avec des hérétiques. Avant mars 1207, l’évêque de Toulouse consent au don de l’église de Prouilhe pour que des femmes « converties par les prédicateurs contre l’hérésie » puissent y vivre religieusement. En mars-avril 1207, Diègue et Dominique participent à une grande dispute publique et contradictoire à Toulouse.

Un groupe de frères est établi à côté de la communauté féminine pour veiller sur elle et la servir. Dominique s’établit à Toulouse en 1215 mais la dispersion des frères durant l’été 1217 a souvent été située à Prouilhe.

Essor et rayonnement de Prouilhe

En 1219, Dominique est à Rome, chargé par le pape Honorius III de rassembler les moniales dans le nouveau monastère de Saint-Sixte. Il envisage un temps de transférer la communauté de Prouilhe dans la Ville éternelle. En 1221, il a renoncé à cette idée mais appelle huit sœurs, dont Blanche, qui devient prieure. Les sœurs voyagent sans doute avec l’archevêque de Toulouse, Foulques. Au chapitre général célébré cette année à Bologne, le prélat donne à Dominique et à ses successeurs l’église de Fanjeaux ; on devait espérer fonder un couvent dans le bourg.

La première prieure, Guillelmine de Fanjeaux (1206-1224) donne un véritable essor à la communauté. Le monastère grandit rapidement, en nombre et en qualité. En 1256, la maison compte 140 religieuses. Elle fonde d’autres monastères : Condom en 1283, Marseille en 1286, Saint-Pardoux en 1293, Montpellier en 1295, Saragosse (Espagne) en 1299. Dans les années 1340, Prouilhe est à son apogée. Le monastère compte près de 150 moniales. Il donne naissance à Sainte-Praxède d’Avignon en 1347 ; ce monastère aura lui-même un rayonnement important. D’importantes propriétés foncières composent le temporel.

Les prieures royales

En 1538, le roi de France François Ier nomme une prieure perpétuelle. Il s’agit d’une interprétation abusive du concordat conclu à Bologne avec le pape Léon X en 1516. Le roi avait obtenu le droit de nommer à certains bénéfices ecclésiastiques ; il étend son privilège à la nomination de certaines prieures. La première prieure royale était dominicaine. Par la suite, le roi de France nomme des bénédictines et des cisterciennes. La communauté résiste vivement à ces dispositions mais les négociations n’aboutissent qu’en 1751. Le roi consent alors à remettre la désignation de la prieure à la communauté mais se réserve la nomination. Les deux dernières prieures avant la Révolution, Françoise du Pic de Bellegarde (1751-1772) et Anne de Montault-Miglos (1772-1792), s’emploient à reconstruire le monastère dévasté par un incendie en 1715. Confié à l’architecte Hardouin-Mansart de Sagonne par la volonté de Louis XV, le travail est exécuté de 1747 à 1765.

La Révolution

La Révolution balaye la présence dominicaine à Prouilhe et à Fanjeaux. En 1792, les sœurs abandonnent le monastère. Vendu comme bien national, il sert de carrière de pierre ; il ne reste rien des bâtiments neufs du XVIIIe siècle. La chapelle dans laquelle on vénérait la poutre du miracle du feu, à Fanjeaux, est laissée à l’abandon. Elle s’écroule et au XIXe siècle la poutre est transportée dans l’église paroissiale.

La reconstruction au XIXe siècle

En 1855, Madame Jurien de la Gravière achète une partie de l’ancien terrain sur lequel s’élevaient les bâtiments de Prouilhe. Elle entreprend de faire bâtir un nouveau cloître et une vaste crypte (1857-1878). Le P. Hyacinthe-Marie Cormier intervient en demandant à des sœurs de Nay, dont la maison avait été fondée au XVIIe siècle par des moniales de Prouilhe, de reprendre le projet. Les sœurs achètent le monastère et le terrain de Prouilhe. Mère Agnès de l’Enfant-Jésus, désignée comme prieure, se met à l’ouvrage. Dès 1880, le monastère revit, dans le grand élan de la restauration de l’Ordre en France. Cette résurrection entraîne la réapparition du pèlerinage à Notre-Dame de Prouilhe. L’institution du mois du Rosaire par le pape Léon XIII en 1883 accroît le flot des pèlerins. À partir de 1885, sous l’influence du P. Doussot, dominicain, et de l’évêque de Carcassonne, Mgr Arsène Billard, on envisage, pour les accueillir, l’érection d’une basilique de style romano-byzantin sur des plans de l’architecte Charles Saint-Père, repris ensuite par Édouard Florent. La première pierre est bénie le 22 juillet 1886 en présence de 3 000 personnes. La mort des protagonistes et l’expulsion des dominicains de France en 1903 ne permettent pas de venir à bout du chantier. La communauté des moniales échappe cependant à l’exil et poursuit sa mission de prière, de pénitence et d’apostolat selon l’esprit de saint Dominique.

XXe et XXIe siècles

Dans le bourg de Fanjeaux, des congrégations de sœurs dominicaines apostoliques s’implantent : en 1935, les dominicaines de la Sainte-Famille ouvrent un orphelinat dans l’ancien couvent des frères (c’est aujourd’hui une maison d’accueil) ; en 1963, les dominicaines du Verbe incarné reprennent le Belvédère, maison d’accueil édifiée par les frères de Toulouse, et s’engagent dans la vie paroissiale.

De nouvelles fondations naissent depuis Prouilhe : des sœurs partent pour le Canada (1925) puis pour le Brésil (1930). En 1968, d’importants travaux d’aménagement ont lieu dans le chœur de l’église. Un nouvel incendie, en 1990, contraint les moniales à réaménager les lieux d’accueil.

En 2003, un nouveau tournant est pris lorsque la communauté de Prouilhe s’ouvre à une dimension internationale en accueillant des moniales originaires d’autres continents et d’autres monastères. Des travaux d’aménagement de la basilique et du chœur sont alors entrepris.

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